Nous disons Oui au CFA
Les présidents Macron et
Ouattara, le 21 Décembre 2019 à Abidjan, lors de
l’annonce historique sur la « fin du CFA ».
l’annonce historique sur la « fin du CFA ».
Ce qui fait l’actualité en cette fin d’année en CI et peut-être en Afrique de l’Ouest francophone, c'est l’annonce du remplacement du CFA par l’eco dès juillet 2020.
Depuis un certain temps, le
CFA est décrié par des individus qui se proclament
« panafricanistes ». Ils font énormément de bruit, mais en fait sont
une minorité, bien souvent ignorante du fonctionnement d’une économie.
Le problème c’est qu’en martelant un même message, cela finit par créer une
sorte de programmation de la pensée collective, qui met sous pression les
décideurs.
Depuis 2016, trois
articles ont été produits sur cette question pour montrer que créer une
monnaie commune à l’échelle de la CEDEAO était un pari risqué et dangereux.
Dire qu’on va décoller parce qu’on va utiliser une monnaie différente du CFA
est totalement illusoire.
Les
vertus du CFA
Il faut le dire encore une
fois haut et fort, si pendant la décennie de crise, les Ivoiriens ont pu
manger, se déplacer, se soigner, voyager etc…etc… si la misère et la pauvreté
n’ont pas réellement frappé à leur porte, c’est tout simplement parce que la
valeur de la monnaie qu’ils utilisaient
a été constante. Que se serait-il passé si la monnaie était fluctuante ? Le franc CFA a été un bouclier. Ce point n’a pas fait
l’objet de débat après la crise. Et c’est bien dommage.
La stabilité du CFA se
révèle quand on se déplace dans un pays anglophone. On est surpris de la quantité de
monnaie qu’il faut pour acheter des choses banales, et le
fait que cette quantité varie constamment. Dans ces pays, les monnaies
subissent des fluctuations qui créent
« la danse des prix », et des pénuries en tout genre. Ce sont des phénomènes inconnus en zone CFA.
Souvent dans les actualités,
on entend parler de pénuries d’essence au Nigéria. Cela reste difficile à
comprendre pour un pays qui est le
premier producteur africain de pétrole.
Cependant le Nigéria ne raffine
pas assez de pétrole pour tous ses besoins. Il importe des produits finis de la CI et de certains autres pays. Et
bien souvent, le cours du naira ne permet pas la rentabilité de l’opération, le
prix des carburants étant fixé par les autorités. Les opérateurs attendent donc qu'il soit à un meilleur niveau.
Pour les pays membre de la
zone CFA, les emprunts en euro dans le fond se remboursent en CFA vu la parité
fixe entre ces deux monnaies. Ce qui n’est pas le cas des pays qui n’utilisent
pas le CFA, leurs emprunts en euro se
remboursent en euro. Aujourd'hui certaines banques centrales africaines stock du CFA dans leurs réserves. Sur le marché monétaire de l’uemoa,
quelque 1 000 milliards de franc CFA sont levés chaque année en moyenne depuis
2015. Le CFA est une monnaie crédible, qui a toute la confiance des
investisseurs.
Le CFA oblige les Etats à la
discipline budgétaire. Ils ne peuvent
pas tricher en faisant imprimer de la monnaie par la banque centrale pour
financer leurs dépenses (salaires, dette intérieure).
Les détracteurs du CFA sont totalement dans l'idéologie, refusant de prendre en compte tous ces aspects des choses.
Les détracteurs du CFA sont totalement dans l'idéologie, refusant de prendre en compte tous ces aspects des choses.
La France « suce »
t-elle les économies africaines via le CFA ?
Le CFA est une monnaie dont
la valeur est fixe par rapport à l’euro. La parité fixe, et la convertibilité
illimitée vont de pair. Or les Etats
africains n’ont pas les moyens de
garantir cette valeur fixe (on parle de convertibilité illimitée). Cette
garantie est apportée par la France.
Bien évidemment cette garantie a un coût. Vous ne pouvez pas demander à un pays ou une tierce
entité de garantir votre monnaie et ne rien payer en retour. Cela n’a pas de
sens. C’est un service financier que vous solliciter, qui peut être assimilé à une couverture d’assurance contre une perte
de valeur votre monnaie. Cela ne peut pas être gratuit.
Et vu que la valeur d’une
monnaie se maintient grâce à des réserves de change, principalement le dollar, la
livre sterling, le deutschemark ( aujourd’hui l’euro), et l’or, il est
demandé aux Etats utilisant le CFA de mettre
une partie (50% aujourd’hui) de leurs
réserves de change dans un compte géré par le trésor français, le compte
d’opération.
Pour beaucoup, par ce
compte, la France « suce » les Etats de la zone CFA. C’est tout
simplement impossible pour la simple
raison que c’est de l’argent qui est sur un compte, qui produit des intérêts et dont le montant
total à ce jour est connu de tous. La preuve, les Etats africains vont rapatrier cet argent
dans les coffres de la BCEAO dans le cadre de la création de l’éco. Ce qui n’aurait pas été possible s’il avait
été utilisé par la France.
Intéressons-nous maintenant au montant de ces avoirs. En 2015 ces avoirs s’élevaient à 5 665 milliards de CFA, soit 8, 063 milliards d'euros à peu près. Le budget de l’Etat français lui s’élèvait à 373 milliards d'euros en 2015. On peut se
rendre ainsi compte des ordres de grandeur. Dire que la France utilise cet argent pour « se développer »
comme on l’entend ici et là, cela fait sourire.
Le CFA : une « maison de servitude » ?
Pour rappel le CFA aété créé
en 1945. Avant cette date, c’est le franc français qui circulait dans les
colonies. On s’est rendu compte que
c’était une monnaie surévaluée par rapport à l’activité naissante au sein des
colonies. Il a fallu donc faire circuler une monnaie adaptée à la taille de leurs besoins, et indexée sur celle de la
métropole. Ainsi fut créée le CFA.
Pour ceux qui prétendent
que le CFA est un instrument mis en
place à l’origine pour « sucer » les pays africains, on peut difficilement croire qu’en 1945,
il y avait vraiment quelque chose
à « sucer » dans les colonies.
Le CFA est une solution pragmatique qui s’est imposée d’elle-même compte
tenu de la façon dont la France administrait ses colonies, différente de la
méthode anglaise où les colonies s’autogéraient.
Au fil des années, des pays
non colonisés par la France ont intégré cette zone. C’est la Guinée équatoriale
en Afrique centrale, et la Guinée-Bissau en Afrique de l’Ouest. Personne n’a
mis de couteau sous la gorge des dirigeants de ces pays. De même certains pays
francophones qui avaient quitté cette zone comme le Mali et le Togo, y sont
retournés. Ces pays ont abouti à la
conclusion que le CFA était l’instrument monétaire le mieux adapté pour eux. Généralement
une maison de servitude est désertée, on se tient bien éloigné d’elle, on ne la
fréquente pas.
Le CFA n’est pas une monnaie
forte qui pénalise les exportations de nos pays comme certains veulent le faire croire. Un CFA vaut non pas 1 euro, mais 0, 0015 euro. Nous n’exportons pas des produits industriels,
mais des matières premières qui ne supportent pas de concurrence en tant que
telle. Leurs prix se déterminent selon l’offre et la demande. Le CFA n’intervient
pas dans ces échanges, facturés en dollar pour la plupart.
,
Le CFA reste en place
Malgré les annonces
fracassantes faites par les présidents français et ivoirien le 21 décembre
dernier, rien ne change fondamentalement, ni la parité fixe de ‘’ l’éco’’avec
l’euro, ni la garantie de convertibilité illimitée apporté par l’Etat français.
Nos présidents se sont bien
gardés de dire la contre –partie que vont payer les Etats africains en échange
de la garantie de convertibilité illimitée que leur apporte la France. S’il est vrai que toutes les réserves seront désormais
dans les coffres de la BCEAO à Dakar, il est aussi certain que d’une manière ou
d’une autre une partie de ces réserves sera mise à la disposition du trésor
français. Il n’y a pas d’autre option possible.
La France ne siègera plus
dans les instances de la banque centrale, ni celles de l’UEMOA, mais là encore
d’une manière ou d’une autre elle fera entendre sa voix par d’autres canaux dans
la mesure où c’est elle qui garantira la monnaie qui sera émise. Ainsi on peut
le dire haut et fort, le CFA reste bel et bien en place.
Merci pour cette mine d'informations.
RépondreSupprimerVous êtes formidable.
Merci, vraiment pour ces investigations
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