Réflexions sur les infrastructures construites par la Chine
Abidjan le 30 / 09 /2021
Le barrage de Soubré d’une puissance de 275 MW, le plus grand de la Côte d'Ivoire. Conçu,
financé et construit par la Chine. Livré le 02 Novembre 2017, sa construction a duré quatre
années.
Le 28 Novembre 2018, la CI annonçait la mise prochaine sur pied d’une agence chargée de suivre les infrastructures construites par la Chine dans le pays. Cette annonce avait été beaucoup commentée dans les médias occidentaux. Depuis un certain temps, les gouvernements africains se posent beaucoup de questions sur les infrastructures construites par la Chine. Mais personne n’ose émettre la moindre critique. Pour la première fois un Etat africain affichait ouvertement sa volonté de « regarder les choses de près », revendiquant ainsi un droit de regard sur la conduite de ces investissements. Pourtant, cette agence n'a jamais vu le jour, car les Chinois s'y sont implicitement opposés.
Les prêts octroyés par la Chine aux Etats Africains sont assez singuliers. Tout d'abord, contrairement aux occidentaux, les Chinois ne mettent pas de « l’argent frais » sur la table. Ils construisent des infrastructures « à crédit ». C'est la première caractéristique de leurs prêts. Tout dans ces infrastructures vient de Chine : la main d’œuvre, les équipements, les fournitures, les équipements, l’expertise, le carburant des machines, etc….etc… même la nourriture du personnel. Tous les décaissements nécessaires se font en Chine.
Ainsi la Chine n’engage que des yuans (sa monnaie locale), mais les Etats paient en dollars pour les infrastructures construites. On entend souvent dire que la Chine déverse des milliards de dollars en Afrique. En réalité, pas un dollar n’est dépensé, mais plutôt des yuans. Pour éviter d’être face à des Etats qui ne peuvent plus payer, la Chine accepte de se faire rembourser en matières premières : café, cuivre, or et surtout pétrole. C'est la deuxième caractéristique des "prêts" chinois.
Lorsque les Chinois construisent une infrastructure, les Etats africains prennent à leur charge, l’eau, l’électricité, le téléphone, l’internet, les travaux de terrassement, et les éventuelles indemnisations de populations, en somme toute dépense qui doit être obligatoirement effectuée sur place. Sous la pression des opinions publiques, les nationaux sont acceptés sur les chantiers. Mais ils sont affectés aux charges les plus basiques, et leurs salaires sont puisés dans l’apport des gouvernements africains. Car le financement n’est jamais à 100% Chinois. C'est la troisième caractéristique de leurs prêts. Une part est réclamée aux gouvernements africains, elle sert à financer les dépenses qui ne peuvent pas être réalisées en Chine, par exemple les salaires du personnel local. La Chine s'arrange pour n'effectuer aucune dépense sur place.
Aucune entreprise locale n'est sollicitée comme fournisseur ou sous-traitant. Ce qui rend nul l'impact des chantiers d'infrastructures sur l'activité locale. Il n'y a aucun effet d’entraînement sur l’économie. Il n' y a pas de transfert de savoir-faire, ni d'acquisition d'aucune expertise, car les entreprises locales qui pouvaient intervenir sur des lots de l'infrastructure, sont toutes mises de côté. Ainsi les infrastructures ne génèrent ni emplois qualifiés, ni activités industrielles, ni contributions fiscales, ni renforcement des capacités durant la phase de construction. C’est l’économie chinoise qui bénéficie entièrement de l’effet d’entraînement. D’où sa croissance fulgurante depuis les années 90. Que ce soit l'autoroute Abidjan -Bassam, le barrage de Soubré, le stade olympique, l'élargissement du canal de vridi , le second terminal à conteneurs, etc ......etc....... Pas une seule entreprise ivoirienne n'a participé à quelque niveau que ce soit à ces réalisations.
Outre la qualité des matériaux, le coût réel des ouvrages reste aussi un gros point d'interrogation. Les gouvernements africains n' y voient que du "feu". Le stade olympique Alassane Ouattara d'Ebimpé par exemple est supposé avoir coûté 67 milliards de FCFA. Ce sont les Chinois qui le disent et nous devons les croire. Tous les achats ont été faits en Chine. Les Chinois bouclent les projets de bout en bout, les Etats africains doivent se contenter de réceptionner les ouvrages et "se taire".
C'est fort de tous ces constats que la Côte d'Ivoire avait annoncé la création de ce comité qui officiellement devait assurer la supervision, la coordination et le suivi du portefeuille des projets financés par la Chine. Le but étant de vérifier la conformité des infrastructures avec le cahier des charges, contrôler les coûts réels, et mettre sur la table la question de la participation des entreprises locales. Mais la Chine a dit "Niet " à la création de cette agence.
Les coûts réels des équipements utilisés resteront toujours un mystère pour nos gouvernements. De même, la participation d’entreprises locales restera exclue, car la Chine y trouve son compte. Ce sont ces deux éléments qui rendent son modèle d’intervention viable partout dans le monde. Aujourd’hui aucun Etat ne peut lui dicter des conditions. La Chine est devenue trop puissante. Elle règne en maître dans la construction des infrastructures partout dans le monde (Afrique, Asie, Amérique latine, Europe de l’Est).
L’annonce de ce comité a été une gesticulation inutile des autorités ivoiriennes. D’ailleurs, cela semble avoir retardé l’annonce conjointe par les deux pays d’un portefeuille de projets de 2 000 milliards de FCFA sur la période 2020-2025. La signature de convention aurait dû intervenir en 2019. Des représailles de la Chine ? Cela en a tout l’air. Les autorités ivoiriennes sont prévenues. Douglas Mountain oceanpremier4@gmail.c
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