Comment le Franc CFA a maintenu à flot l'économie malienne

 

Abidjan le 20 Janvier 2022

image.png

Marche des Maliens à la place d'indépendance de Bamako contre les sanctions de la CEDEAO, le 14 Janvier dernier.  



Les sanctions qui frappent actuellement le Mali ont relancé le débat sur le CFA. La rupture des concours de la BCEAO à l’Etat malien condamne celui-ci à une crise certaine de liquidités à très court terme. D’ici un ou deux mois tout au plus, les effets devraient se faire sentir notamment lorsqu’il s’agira de payer les fonctionnaires. Déjà les Maliens se sont rués vers les banques commerciales dès le lendemain des sanctions pour retirer toutes leurs économies. Ainsi les banques commerciales fonctionnent au ralenti en ce moment. On ne voit pas comment le gouvernement malien pourra sortir de cette situation. Depuis le 09 Janvier, date de la prise des sanctions, les autorités de Bamako se disent '' ouvertes  au dialogue avec la CEDEAO '' mais n'ont mis aucune proposition sur la table. En fait, elles travaillent en ce moment au contournement des sanctions.




Beaucoup pensent que le Mali devrait songer à se retirer de la zone CFA afin d’acquérir sa « vraie souveraineté ». Outre le caractère totalement irréaliste d’une telle proposition, il faut rappeler que dans son histoire, le Mali s’était déjà retiré du CFA en 1962, pour réintégrer à nouveau la zone CFA en 1984. Personne n’a l’y a contraint. Les maliens ont fait l’expérience d’une monnaie indépendante. Et cette expérience n’a manifestement pas été heureuse pour eux. Le Togo avait aussi brièvement eu sa monnaie (le franc togolais), qu’il a abandonnée pour adopter à nouveau le CFA (1963). Quant à la Guinée Bissau, et la Guinée équatoriale, ils n’ont pas été colonisés par la France, mais ont demandé et obtenu leur intégration dans la zone CFA.




Lorsqu’un pays est en situation de conflit intérieur comme le Mali, il se produit une expatriation des capitaux. Ils sortent du pays parce que la guerre crée une incertitude. En sens inverse, très peu de capitaux entrent,  les investissements directs se tarissent toujours du fait de l'incertitude. Ces deux phénomènes conjugués se traduisent par une dépréciation de la monnaie, elle perd sa valeur, parce que personne n’en veut. Les prix bondissent, et la misère s‘installe. Ainsi dans les pays en conflit, l’économie s’effondre parce que la monnaie s’effondre la première.




Or on le voit au Mali et en Centrafrique, il y a certes une crise, mais pas vraiment de misère. Les gouvernements payent normalement les salaires, les importations ne sont pas hors de portée pour les opérateurs, ce qui permet des prix à la consommation relativement constants. Les choses fonctionnent ainsi parce que la monnaie qui est utilisée dans ces pays, à savoir le Franc CFA est une monnaie stable. La valeur fixe du CFA par rapport à l'euro garantit la stabilité des prix, ainsi le pouvoir d’achat des populations ne s'effondre pas. Il y a certes un peu d'inflation, mais elle est sans commune mesure avec celle que l'on rencontre dans certains pays en guerre dont la monnaie flotte sur les marchés.  




Le Mali et la Centrafrique n’utilisent pas une monnaie qui a perdu toute valeur du fait de la guerre qu’ils traversent, mais une monnaie qui est stable quels que soient les aléas. Ainsi le CFA maintient ces économies à flot. Il constitue un bouclier qui les protège de l'hyperinflation. C’est quelque chose dont les populations n’ont pas vraiment  conscience. Et c'est quelque chose qu'il faut avoir à l'esprit avant de demander au gouvernement malien de chercher à imprimer sa propre monnaie. Si le Mali, jusqu'au renversement d'IBK en Août 2020, a pu afficher des indicateurs économiques qui n'étaient pas aussi mauvais , on peut le dire c'est en partie grâce au CFA.



Douglas Mountain 

Le Cercle des Réflexions Libérales /  oceanpremier4@gmail.com

Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

'' Oui '' au CFA "Non" à la monnaie unique au sein de la CEDEAO

Le CDD : un instrument de compassion de la France envers les pays fortement endettés

Trente ans du génocide rwandais : Le lourd secret sur la conscience du flamboyant Paul Kagamé