Le Président Roch Marc Christian Kaboré du Burkina vers la porte de sortie ?

 Abidjan le 22 Novembre 2021

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Le Président Du Burkina Faso lors de l'allocution solennelle le 31  Décembre 2019. 

Aujourd’hui l’homme est fortement contesté, la rue exige sa démission suite aux                  attaques djihadistes  récurrentes que l’armée peine à contenir. 



La semaine du 21 au 27 Novembre sera délicate pour le Président du Faso, Roch Marc Christian Kaboré. L’attaque de la base d’Inata dans le Nord du pays le 14 Novembre dernier, qui a fait selon le bilan officiel 53 victimes dont 49 gendarmes et quatre civils, a causé un électrochoc dans l’opinion. Et ce bilan est peut être provisoire, une cinquante gendarmes manquent à l’appel. Le gouvernement dit avoir récupéré « 46 éléments », mais se refuse à communiquer les noms, ce qui amène les organisations de la société civile à dénombrer quelque « 90 victimes » parmi les soldats. C’est à ce jour l’attaque la plus meurtrière ayant visé des soldats.


 

L’opinion publique a été d’autant plus révoltée qu’une partie de la correspondance entre le commandant de la base et sa hiérarchie, a été mise sur les réseaux sociaux. L’homme se plaint que l’unité manque de ravitaillement depuis deux semaines, les soldats étant obligés de chasser aux alentours de la base pour se nourrir. Il demande la permission d’abandonner cette position.


 

Une fois l’attaque connue dans toute son ampleur,  des dizaines de milliers de Burkinabé sont descendus dans les rues des grandes villes les 16 et 17 Novembre derniers pour exiger la démission du Président Roch Marc Kaboré qu’on tient pour responsable du drame. La contestation est structurée autour d’un collectif, Sauvons le Burkina, qui regroupe plus d’une centaine d’organisations de la société civile. Un ultimatum a été adressé au Président Kaboré, sa démission doit intervenir avant le 27 Novembre.


 

Des manifestations monstres sont prévues pour ce jour, elles seront suivies de la désobéissance civile si le Président « n’obtempère pas », ont indiqué dans une conférence de presse les responsables du collectif.  Dans la foulée, un convoi militaire français qui était parti d’Abidjan et devait rejoindre le Niger a été bloqué deux jours dans la vile de Kaya. Les populations du Burkina, du Niger et du Mali imputent la dégradation de la situation à l’armée française. Elles trouvent inadmissible « qu’avec tous leurs équipements, les soldats français ne parviennent pas à stopper les attaques ». Pour beaucoup, la France est « complice » des djihadistes. Le procès de Thomas Sankara qui jusque-là focalisait l’opinion, n’intéresse plus personne aujourd’hui, les Burkinabé y voient une « perte de temps ».


 

Signe de la gravité de la situation, les Evêques ont fait une annonce. Ils « appellent au dialogue », mais demandent aussi au pouvoir de communiquer avec vérité sur les faits et la situation réelle du pays. L’heure est délicate pour le Président Kaboré Roch Marc Christian. Grand et solidement bâti, l’homme est réputé autoritaire, avec un ton cassant. Il a occupé en personne le porte-feuille du Ministère de la défense du 02 Juillet au 14 Octobre dernier, suite à une attaque qui avait elle aussi révélé des dysfonctionnements dans l’armée.

 

 

Dans de pareilles circonstances, la communication s’avère décisive. Peu avant sa chute en 2014, le Président Compaoré, le prédécesseur de Roch, faisait lui aussi face à de grandes manifestations de rue. Sa dernière allocution n’a pas pu être vue par la population, les locaux de la télé d’Etat avaient été saccagés. Beaucoup ont affirmé plus tard qu’elle aurait eu un grand impact sur les foules si elle était passée au journal de 20h, la veille de sa fuite. L'homme aurait peut-etre repris la main. 

 

 

Aujourd’hui, il y a clairement quelque chose à revoir dans la communication du Président Roch Kaboré. Deux jours après l’attaque, dans un communiqué de presse, l’armée burkinabé affirmait avoir neutralisé (c’est-à-dire éliminer) « 90 terroristes ». Ce n’est pas la première fois que l’armée donne ce genre de bilan au lendemain des attaques où elle perd des hommes. Elle le fait sans montrer un seul corps, alors que les djihadistes mettent toujours sur les réseaux sociaux les corps des soldas tués. Pour les manifestants, « le pouvoir doit cesser de prendre les Burkinabés pour des enfants ».


 

Le Président Kaboré ne s’en sortira que par la communication. Il s’est déjà exprimé au sorti d’un conseil des ministres tenu le 17 Novembre, trois jours après le drame. Comme toujours il a parlé de compassion envers les familles, d’enquête pour situer les responsabilités, de l’union qui doit caractériser les Burkinabés etc…..Ce sont des mots habituels. Deux officiers supérieurs de la gendarmerie ont aussi été relevés de leurs fonctions. Mais cela n’est pas nouveau, à chaque attaque des tètes sautent. Donc tout cela n’a eu aucun impact sur la colère des populations. Le Président Kaboré doit faire une annonce solennelle à la nation, dans laquelle il doit réaffirmer sa légitimé démocratique. On doit sentir sa détermination à assumer ses fonctions quelque soit la crise du moment. 


 

La classe politique burkinabé doit savoir que les attaques au Burkina sont à situer mettre dans un contexte global incluant le Mali, le Niger, le Tchad, le Nigéria et le Cameroun. Tous ces pays enregistrent des morts sur leur sol de façon quasi quotidienne, le phénomène n’est pas propre au Burkina. S’il est vrai que des dysfonctionnements sont à relevés, il faut néanmoins souligner que tous les gouvernements tâtonnent face au terrorisme. Ce qu’il faut redouter au Burkina aujourd’hui est un scénario "à la malienne", avec un officier téméraire qui se lève pour déposer le président. La colère monte aussi dans les casernes.



Ceux qui appellent à la démission du Président Kaboré vont conduire le pays dans la confusion d’une prétendue transition qui ne règlera aucun problème de fond, le cas du Mali est sous nos yeux. Tout désordre politique au Burkina entrainera un relâchement dans le commandement de l’armée, ce qui pourra être mis à profit par les djihadistes pour passer à l’offensive comme cela s’est produit au Mali en 2012, suite au renversement du Président ATT. Avec toute la puissance de son armée notamment son aviation, le Nigéria ne parvient pas venir à bout du phénomène. C’est dire la complexité de la menace. Les Burkinabés doivent faire attention. Personne n'a une baguette magique pour venir à bout du terrorisme. 

 

Douglas Mountain

Le Cercle des Réflexions Libérales

oceanpremier4@gmail.com

 

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