Le président Gbagbo : un mois après

 

Abidjan le 16 Juillet  2021

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« Je suis heureux de retrouver la CI et L’Afrique », telle fut l'unique déclaration                                           du Président Gbagbo à l’aéroport, dans un contexte un peu chaotique.


Le  17 Juin 2021, le Président Laurent Gbagbo rentrait enfin au pays à bord d'un vol régulier en provenance de Bruxelles, après 10 ans d’un  procès fleuve à la CPI. L'homme était accusé de crimes contre l'humanité suite à  la crise post électorale ( Octobre 2010-Avril 2011) et ses 3 000 victimes officielles, survenues selon l’accusation, du fait de son refus de reconnaître sa défaite lors de la présidentielle d’Octobre 2010.


Totalement blanchi par cette juridiction le 31 Mars 2021,  le président Gbagbo était en attente du feu vert des autorités pour regagner la CI, chose faite le 17 Juin dans une très grande ferveur, preuve que sa popularité reste intacte.  Au début de son procès, il avait dans une déclaration,  mis en garde aussi bien le pouvoir que les membres de sa famille politique,  '' ceux qui pensent que je ne vais plus revenir se trompent'', avait-il déclaré.  Pari tenu donc.

 

Il faut saluer ici la résilience de l’homme, sa capacité à endurer, à encaisser, à faire face. L’homme montre encore une fois qu’il est un leader de terrain, quelqu’un qui descend dans la vallée, qui « transpire » pour ses idées, même si son approche des situations n’a pas toujours produit des résultats merveilleux tout au long de son parcours.

 

 

Dans un climat politique qui se veut apaisé, le président Laurent Gbagbo  avait affirmé regagner son pays pour participer à la réconciliation en cours. «  Je suis content de retrouver la Côte d’Ivoire et l’Afrique », telle fut sa première déclaration à l’aéroport. Sur des  sites de la BBC afrique, et du média américain VOA, beaucoup de commentaires sont venus d’Afrique australe et centrale. Les médias francophones en Europe ont consacré une large couverture à l’évènement, c’était l’actualité du continent les 16 et 17 Juin derniers, preuve encore une fois, que la Côte d’Ivoire, ce pays béni, occupe bien une place particulière en Afrique. 


Officiellement, la réconciliation est le mot d'ordre, tant du côté du pouvoir que de celui de l'opposition dans toutes ses composantes.  Pourtant quatre semaines après la venue de l'homme, on peut le dire, la défiance est grande avec les autorités.  L'atmosphère est de plus en plus pesante.  A l’intérieur même de sa famille politique, le retour du président Gbagbo devait aussi apporter des clarifications. Or il semble que les choses coincent également à ce niveau. 


Pourtant des questions de fond demeurent, auxquelles des réponses claires devront être apportées, afin de donner un contenu à cette réconciliation prêchée de tout bord.



Pascal Affi N’Guessan


Le retour du Président Gbagbo devait objectivement mettre un terme à la scission au sein de son parti. Tout le monde s’accordait sur ce point. En revanche l’inconnue résidait dans l’attitude de Pascal Affi N’Guessan (PAN) , le président de la branche légale, celle reconnue par les autorités.  Le niveau de défiance entre les deux hommes est tel aujourd’hui qu’on voit difficilement l’un travailler sous les ordres de l’autre. « Si Gbagbo m’a fait, moi aussi je l’ai fait », déclarait PAN suite à sa rencontre avec son mentor à Bruxelles, une rencontre qui avait mis à jour le fossé qui séparait désormais les deux hommes. 


Il faut rappeler que PAN est devenu le président de la branche légale suite à une décision de justice. Pourtant, même s’il a la loi avec lui, il ne  pourra plus diriger cette formation contre l’avis de son fondateur. Il devra  tôt ou tard céder sa place de président. Reste à savoir son point de chute.


L’homme a quand même pris du volume en dix ans. Son attitude inflexible durant la dernière présidentielle a surpris l'opinion, il était vu comme quelqu’un à la personnalité molle, plus ou moins à la solde du pouvoir en place. On le pressentait même au gouvernement. Lors de cette crise, il  a montré qu’il avait une certaine carrure.


Dans les semaines précédant le 17 juin, il était apparu sur plusieurs plateaux de télévision, affichant une sérénité quand on lui demandait s’il s’inquiétait du retour du président Gbagbo. Pour lui, ce retour « clarifierait » la situation au sein du parti, mais il restait vague sur  ce terme. Visiblement l’homme a un « plan B » dans la tête. 


Selon la presse, il semble qu'il ne veuille "rien lâcher" dans les tractations en cours en ce moment pour qu'il cède son fauteuil. Quatre semaines après le retour du président Gbagbo, les deux hommes ne se sont toujours pas rencontrés. Pourtant PAN ne pourra survivre politiquement qu’en créant sa formation à lui. Il n'y a pas d’autres issues possibles s’il veut rester  crédible. 




Simone Ehivet Gbagbo

 

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Accolade entre  le président Gbagbo et son épouse  Simone à l’aéroport. L’homme a eu un                  geste de recul et  s’est dégagé de l’étreinte. Il a ensuite fait un geste comme s’il voulait la                    congédier, le tout sous le regard incisif de sa « seconde épouse » Nadiana  Bamba.



C’est la toute première ligne qui a bougé,  le Président Gbagbo a déposé une demande de divorce d’avec son épouse Simone, auprès du tribunal de première instance d’Abidjan le 21 Juin, quatre jours après son retour. Cette démarche a jeté un froid et une immense incompréhension dans toute l’opinion (adversaires comme partisans), aussi bien en CI, qu'en Afrique.  On savait le couple quasiment en rupture, mais personne n’aurait imaginé une telle accélération. Le lendemain du retour,  il se murmurait déjà qu'il avait évité le pavillon d’honneur lorsqu'il a appris que Simone s’y trouvait. On apprenait aussi qu’il avait clairement signifié à Simone le 16 Juin (la veille de son arrivée), par l’entremise d’un ancien ministre, qu’il ne souhaitait pas la voir à l’aéroport.


 

Le  fait qu'elle s’y soit rendue en dépit de cet avertissement a-t-il été pris par l’homme comme un geste de défi, d’où sa décision d’accélérer la question du divorce en guise de riposte ?

 

Le Président Gbagbo s'est rendu à la Cathédrale Saint Paul du Plateau le Dimanche 20 Juin, pour assister à la messe, célébrée par le Cardinal Kutwa. C’est dire que les deux hommes ont certainement eu un entretien téléphonique la veille. Or Les Evêques avaient totalement désapprouvé le « mariage traditionnel » du Président Gbagbo avec Nadiana Bamba en 2001. L’homme s’était alors progressivement tourné vers les Eglises évangéliques, peu regardantes sur ces aspects, axant plus leur message sur la réussite matérielle. Dimanche, le Cardinal Kutwa annonce le retour du Président Gbagbo à l’Eglise Catholique et lui remet un chapelet. Lundi, l’homme annonce sa demande de divorce. Faut-il y voir une coïncidence ? Ou alors l'Archevêque lui a-t-il implicitement demandé de clarifier sa situation matrimoniale « sans tarder » ? 


Une autre explication reste possible. Forte de son emprise totale et définitive sur l'homme, Nadiana Bamba  a-t-elle décidé de passer  '' à la vitesse supérieure'' et mettre '' KO '' sa rivale dès son retour au pays ? Dans la vidéo de l'accolade, on peut l'entendre dire « Elle s’en va », en référence à Simone. 

 

En fait, la question fondamentale n’est pas tant le divorce lui-même,  que la place de l’un et l’autre dans le parti. C’est à ce niveau que les choses coincent depuis des années. Simone a de très hautes ambitions auxquelles elle n’ a pas renoncé. Elle vise la tête du parti de son mari pour avoir ainsi la main sur l’appareil, et elle veut aussi conserver le patronyme ‘’Gbagbo’’ sans lequel toute ascension serait impossible. Celui-ci ne l’entend pas de cette oreille.  Les deux ne s’adressent plus la parole depuis longtemps, l’un cherchant à écarter  l’autre. 

 

Dans une déclaration au début du mois de Juin, Simone avait implicitement suggéré que le Président Gbagbo ne devrait plus « se mêler » de politique à son retour en CI. Les fidèles de l’ancien président avaient rétorqué  qu'il « déciderait lui-même de son avenir ». Simone reste un os au travers de la gorge de l’homme. Il y a une sorte d’animosité entre ces deux fortes têtes depuis les années 2000. 


Un peu comme Bill et Hillary Clinton aux USA. La presse avait maintes fois annoncé leur divorce dans les années 2003, 2004, ce qu’Hillary avait toujours démenti. Le divorce l’aurait privé du soutien d’une partie de l’appareil du parti démocrate américain, et le patronyme ‘’Clinton’’ aurait été effacé de son nom, ce qui aurait été préjudiciable à ses ambitions.


Dans ce bras de fer entre le Président Gbagbo et celle qui reste toujours son épouse aux yeux de la loi, la plupart des cadres penchent ouvertement pour l’ex-première dame. Quant aux militants, ils font tous bloc derrière elle, si on en juge par les réactions sur les réseaux sociaux. Avant même le malaise créé par l’annonce de la demande de divorce, l’image de Nadiana Bamba aux côtés de l’homme a été considérée par beaucoup comme la « fausse note » du retour. Pour tous, elle aurait dû pour la circonstance, se faire discrète et laisser toute la place à Simone, qui bien que n’ayant pas été transférée à la Haye, a souffert autant sinon plus que l’homme.

 

Si Simone ne fait aucun « faux pas », si elle ne se lance pas dans des déclarations injurieuses et polémiques, si elle conserve sa posture de femme bafouée, rejetée, humiliée, alors les dégâts collatéraux risquent d’être lourds pour le président Gbagbo, en termes d’image, et en termes de cohésion interne du parti. Le départ éventuel de Simone sera nécessairement suivi d’une purge envers  ses partisans. Ce sera peut-être Nadiana Bamba qui tirera désormais les ficelles. Il faudra s'attendre à des tensions récurrentes.  

 

Mais on n’en est pas encore là. Le divorce reste une procédure longue et éprouvante, et ce ne sera pas chose facile que d’évincer Simone, réputée avoir une volonté et un tempérament d’acier, et qui bénéficie du soutien de toute la base. Pour preuve l'échec de la procédure de destitution du poste de vice présidence engagée contre elle, sept fédéraux sur dix ont refusé de la démettre.  


Le 28 Juin à Gagnoa, pour bien montrer qu'il ne reviendrait plus sur sa décision malgré les critiques, le Président Gbagbo a rendu publiquement hommage à Nadiana Bamba, " grâce à qui il a pu tenir en prison", " celle qui lui donnait de l'argent pour se nourrir", " celle qui faisait 450 km chaque jour afin de pouvoir le rencontrer  " etc...... Le Jeudi 1er Juillet dernier, une première audience s'est tenue au tribunal d'Abidjan en présence des deux intéressés.  Selon la presse, les deux personnalités ont montré des "signes d'apaisement et de décrispation."  Reste à savoir ce que cela veut dire. Une chose est certaine, Nadiana Bamba ne veut plus rester dans l'ombre, elle entend prendre "toute sa place" auprès de son "homme". Leurs séjours à KInshasa et à Daoukro montrent bien que la page Simone est désormais tournée.



Le Président Bédié


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Les présidents Gbagbo et Bédié le 10 Juillet à Daoukro. On remarque la présence                                        remarquée de Nadiana Bamba aux côtés de l'homme.

Les présidents Gbagbo et Bédié se sont rencontrés le 29 Juillet 2020 à Bruxelles, dans une première rencontre placée sous le signe « de retrouvailles ».  Des discussions ont été engagées entre leurs formations, ce qui a abouti à la mise en place d’une « plate-forme », qui a présenté des candidats dans certaines circonscriptions lors des législatives de 2021. Mais cela garantit-il pour autant une « union des cœurs » entre les deux hommes ?

 

Le Président Gbagbo, même s’il a reconnu que les éléments n’étaient pas réunis pour un scrutin présidentiel inclusif en Octobre 2020, avait demandé à ses partisans de ne pas s’associer au mot d’ordre de désobéissance civile lancée par toute l’opposition réunie autour du Président Bédié.


Le 10 Juillet à Daoukro est intervenue leur seconde rencontre, placée elle sous le signe de la " réconciliation". Le président Gbagbo s'est positionné comme un opposant de premier plan, de par ses discours. Si l'atmosphère était à la ferveur,  cela efface-t-il pour autant la défiance entre  les deux hommes,  née du  « contentieux de 2010 ».  A leur âge, on ne peut pas faire facilement table rase des peines, des douleurs et des ressentiments du passé comme des jeunes de trente ans. Il faudra encore beaucoup de rencontres entre les deux hommes pour parvenir à un projet commun. Ce n’est pas acquis d’avance. 


Le Président Gbagbo comptabilise 10 ans au pouvoir contre 6 pour le président Bédié. Il a traversé de nombreuses crises,  entre autres celle de son jugement à la CPI.  Dans les années 90, il a été le principal opposant d'abord au président Houphouet, ensuite au président Bédié lui-même. Ainsi, quoi que ce dernier soit plus âgé, le président Gbagbo a un cv politique bien plus lourd. Il faut s'attendre à une guerre de leadership. 


On voit difficilement le président Gbagbo, avec son caractère indépendant, suivre sagement son aîné. Il est revenu de la Haye avec une énergie décuplée, et une lueur manifeste dans les yeux. Sa carapace est trop épaisse désormais pour qu'il se mette aux ordres de quelqu'un d'autre. Si comme à son habitude, le président Bédié s'engage de tout cœur dans cette nouvelle "alliance", peut-on en dire autant de son nouveau partenaire? 

 

Une grâce ou une amnistie  


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Le Président Gbagbo lors de son procès à la Haye, offensif,  déterminé,                                                     sûr de lui.  


Le Président Gbagbo a-t-il été gracié ou amnistié ? C’est une question majeure qui a déjà été abordée dans la presse avant l'arrivée de l'homme, mais n’avait pas attirée l’attention. Aujourd'hui, elle commence à focaliser l'attention. Une grâce annule la peine mais pas la condamnation. On peut la voir comme une réduction de peine ( à 100% dans ce cas).  Une amnistie annule à la fois la peine et la condamnation. On peut la voir comme une prescription ( rétro-active dans ce cas) des délits commis. Elle se prend par une loi votée au parlement, ou à défaut par ordonnance. 

 

Le Président Gbagbo (avec trois de ses ministres) avait été condamné le 18 Janvier 2018, à 20 ans de prison dans l’affaire dite  ‘’ de la casse de la BCEAO’’.  Les coffres de l'institution avaient été ouverts de force par son régime ,  afin de « payer les fonctionnaires »,  selon la justification qui avait été avancée.


L’ordonnance d’amnistie signée par le Président Ouattara  le 6 août 2018, et qui a permis la libération entre autre de Simone Gbagbo, concerne selon son énoncé, " les personnes poursuivies ou condamnées pour des infractions en lien avec la crise post-électorale de 2010 ou des infractions contre la sûreté de l’État commises après le 21 mai 2011, à l’exclusion des personnes en procès devant une juridiction pénale internationale, ainsi que de militaires et de membres de groupes armés".


Sur la liste des 800 personnes bénéficiant de la mesure, le nom du président Gbagbo nom n’y figurait pas, puisqu’il était encore en jugement à la Haye. Il reste donc sous le coup d’une condamnation même s’il n’effectue pas sa peine. C’est une question qui va de plus en plus faire débat, car la condamnation le prive de certains droits, dont celui de briguer la magistrature suprême.

 

Rester dans son coin et se taire,  ne cadre pas avec la personnalité de l’homme. Le Président Gbagbo a commencé à donner de la voie dès le premier jour, et il continuera à être offensif, il voudra laver « l’affront de 2010 », il ne faut pas se voiler la face. Si son arrestation ( le 11 Avril 2011) et son transfèrement à la Haye ( le 30 Novembre 2011) sont à jamais gravés dans son cœur, il y a aussi l’attitude de certains proches, qui ont déposé leurs valises sous d’autres cieux. Cela l'a certainement  profondément affecté.  Il n’a pas aussi enterré sa mère. C'est quelque chose qui compte en Afrique. Tout cela est de nature à l’inciter à vouloir « prendre sa revanche sur l’histoire ». C’est humain, on ne peut pas lui en vouloir. 


Il y a aussi tous ces milliers de personnes qui se sont rendus à l'aéroport le jour de son retour, et qui se sont aussi massés dans les différentes villes traversées par son cortège, le 28 Juin, en partance pour Gagnoa, sa région natale, et le 10 Juillet en partance pour Daoukro. A Kinshasa il a aussi été la vedette. Pour tout homme politique, cela peut s'interpréter comme des "appels à reconquérir le pouvoir". Mais on ne devra pas aussi en vouloir au pouvoir en place s'il  cherche à le '' neutraliser '' . Car c'est aussi cela la politique. 



Quel sera le contenu de la réconciliation nationale ?

 


La réconciliation nationale reste un concept plutôt vague. Que signifie-t-elle vraiment ? Il n’est pas sûr que l’Ivoirien ordinaire, l’homme de la rue, puisse donner  une réponse claire.  On aura certainement autant de réponses que de personnes interrogées.

 

Qu'entend-t-on par réconciliation nationale ?  On se parle maintenant certes, mais pour se dire quoi exactement ? Retour sur ce qui s’est passé en 2010 ? Va-t-on recompter les voix ? Le Président Gbagbo s’estime-t-il toujours « vainqueur » ou concède-t-il aujourd’hui sa défaite ? La question du résultat des élections de 2010 risque d’engendrer un « débat sans fin » dans l’opinion. Le Président Gbagbo ayant été innocenté, qui porte alors la responsabilité des 3 000 victimes ? Cette autre question risque de « pourrir » l’atmosphère et déboucher sur une crispation. 


Pourtant ces deux questions devront être abordées. En Septembre-Octobre 2001, s’est tenu un forum  pour la réconciliation nationale. C’était grandiose. Les quatre leaders de l’époque se sont exprimés, et ont même pris une photo de famille. Tous les partis politiques, les ONG, les organisations de la société civile, tout le monde a eu son temps de parole. Mais avait-on réellement abordé les vraies questions ? Car un peu plus d’an plus tard, se produisaient les graves évènements du 19 Septembre 2002, qui allaient entraîner la partition du pays jusqu’en 2011. 


La réconciliation, la vraie, ne doit pas consister en un show retransmis en direct à la télé. Il faut réellement se parler, mais loin des caméras, et il faut aborder les questions de fond, pas les questions superficielles, cosmétiques pour donner l’impression à la population qu’on se parle.

 

L’amnistie prise le 06 Août 2018, et le fait que le président Gbagbo soit rétabli dans ses privilèges d’ancien président, sont deux pas encourageants à mettre à l’actif des autorités. Mais il faut aller plus loin, le Président Gbagbo doit pleinement  recouvrer tous ses droits politiques,  ce qui veut dire reprendre sans entraves les rênes de son parti , et pouvoir se présenter à la prochaine présidentielle s’il le désire. 

 

Deux autres questions doivent aussi faire l’objet de discussions : la réforme de la CEI, et l’élargissement de la grâce aux officiers incarcérés. Bien entendu se sont des questions de fond qui ne pourront pas être résolus en une nuit, mais la réconciliation n’aurait aucun contenu,  si des réponses n’y sont pas apportées. 


Un  duel psychologique ?


En attendant le grand discours qui est annoncé par son entourage, le Président Gbagbo ne se prive pas de " taper sur le pouvoir " dans chaque discours qu'il prononce.  Le premier jour, il s'est inquiété de la violence perpétrée par les forces de l‘ordre et les « forces parallèles » sur les personnes venues l'accueillir. Pour lui cela signifie que « la violence se perpétue en CI, et que le chemin vers la réconciliation est encore long ».  De même le choix du lieu de sa première étape après l'aéroport, son QG de campagne de 2010 n'est pas anodin.  Dans ce QG ( qui soulignons-le appartient à Nadiana Bamba), il s'est adressé à des milliers de personnes en disant entre autres " qu'il restait un soldat mobilisé", et en revendiquant la "victoire"  à la présidentielle de 2010.


A Gagnoa, il a affirmé " qu'on l' avait envoyé à la Haye pour écarter un rival politique", " qu'il n'excluait rien concernant 2025". A Daoukro, il a fustigé le " troisième mandat ". Pour lui, une constitution est faite pour être respectée, et l'élection de 2020 était un "braquage électoral". Les ex-présidents ont lancé un appem au "dialogue inclusif ". 


En face le pouvoir commence à se " raidir "  de plus en plus. Suite à ses propos de Daoukro, le sécrétaire exécutif du parti au pouvoir est intervenu pour dire " qu'il n' y a pas nécessité d'un dialogue dès lors que les institutions fonctionnent, le pays n'étant pas en crise". Dans la foulée, le pouvoir a refusé au président Gbagbo une autorisation de visite aux personnes encore incarcérées suite à la crise post électorale, notamment les officiers des forces armées. 


En fait il y a une guerre d'égo entre le président Ouattara et l'ex-président Gbagbo, un duel psychologique à distance. Visiblement ce dernier ignore, nargue le pouvoir , qui de son côté se crispe de plus en plus.  Les ministres ont reçu pour consigne ferme de ne jamais utilisé le terme " président " s'ils s'expriment à son sujet. Qui fera le premier pas vers l'autre ? Ce premier pas qui sera certainement bien accueilli par l'opinion, mais en revanche sera perçu comme une faiblesse par le camp adverse. Il se dit que des personnalités extérieures essaient d'organiser une rencontre entre les deux hommes. On voit difficilement comment cette situation pourra se dénouer. 


En vérité le président Gbagbo retrouve ses vieux réflexes d'opposant politique, il est dans son élément, il est monté sur son cheval et il sera difficile qu'il en descende. Il faut s'attendre à une attitude de plus en plus offensive vis-à-vis du pouvoir. Un bon  départ pour la réconciliation ? C'est maintenant que commence le véritable boulot du jeune ministre KKB, étrangement silencieux depuis la venue de l'homme. DIEU bénisse la Côte d'Ivoire.  Douglas Mountain     oceanpremier4@gmail.com



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